Douiret, une escapade hors du temps
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Sur une route du Grand Sud tunisien, à une vingtaine de kilomètres au sud de Tataouine. Au loin se dresse une colline aux formes étranges, surplombant les maisons blanchies d'un village. En s'approchant on distingue bientôt de multiples ouvertures dans les flancs de la colline, des constructions de pierre tout autour et surtout, immaculée au milieu de l'ocre des roches, une mosquée et son minaret fièrement dressé vers le ciel. Cette colline, qui abrite un village troglodyte surmonté d'un ksar, c'est Douiret "l'ancien"; le village aux maisons blanches, en bas dans la plaine, le nouveau Douiret. Un peu d'histoire "Selon la légende, Douiret, (toponyme arabe, voulant dire «maisonnette») fut fondée par Dhouaièb Ibn Kenana, connu communément par la tradition arabe, sous le nom du Ghazi; il serait venu de la Sakia-Al-Hammra, une lointaine contrée du sud marocain : c'était il y a sept siècles; mais les recherches archéologiques font remonter l'occupation humaine de cette région à l'antiquité." ¹ La population de Douiret, d’origine berbère, s'est installée sur un piton rocheux choisi ainsi au départ comme refuge pour échapper aux razzias des tribus nomades des plaines, aux luttes tribales et, pendant la période romaine, aux romains installés au nord de la région. "Les habitants ont construit une forteresse (ksar) sur l'emplacement le plus inaccessible dans le secteur et l’ont utilisée pour stocker les réserves de nourriture de la population locale (par exemple : huile, orge, blé, figues sèches et dattes). C’était un point stratégique d’où ils pouvaient surveiller toutes les directions et assurer leur défense. Quatre petits ksars ont été construits, dès l’origine, sur les montagnes qui entourent Douiret, aux quatre points cardinaux, ils constituaient des postes de surveillance avancés. Si des envahisseurs arrivaient, le ksar relais, qui se trouvait dans la direction, donnait l’alarme avec des tambours ou la nuit, en allumant des feux. Les habitants du village principal se regroupaient à l’intérieur du village." ² Pendant longtemps le peuple de Douiret a vécu de façon autonome, se suffisant à lui-même, vivant de ses cultures, produisant sa viande, son huile, sa laine, et parlant le douiri ³, une variante de la langue berbère. Mais au cours du siècle dernier un grand nombre de ses habitants ont émigré vers divers villes et principalement vers la capitale Tunis tandis que d'autres s'installaient dans le nouveau village à quelques kilomètres. C'est ainsi qu'au début du 21ème siècle, du vieux village de Douiret ne restent quasiment que des ruines. Le site historique Le ksar, bien qu'en grande partie en ruines aujourd'hui, n'en reste pas moins impressionnant : culminant à plus de 530m , il réunissait plusieurs centaines de ghorfas (pièces voûtées servant de grenier) répartis sur 3 ou 4 étages. Chaque famille disposait de plusieurs ghorfas, identifiés par ses propres symboles apposés au linteau et sur les parois. On retrouve ces symboles dans les maisons du village blotti au pied du Ksar : ceignant la montagne sur plus de trois kilomètres, les habitations troglodytes se superposent sur deux ou trois niveaux parallèles. ² Outre les habitations, le village comptait plusieurs moulins à huile et deux mosquées troglodytes. Chaque famille occupait plusieurs grottes disposées en escalier à flanc de montagne, reliées entre elles par une cour en terrasse où étaient construits une pièce à usage de cuisine et un abri pour les animaux, les grottes servant de pièces principales, de chambres, de réserves et même de "coffre-fort sûr pour les bijoux, les manuscrits et les armes de la famille." ¹ Aujourd'hui La vie est tenace dans ces montagnes, et Douiret peu à peu se reconstruit sous l'égide de l'ASNAPED ¹ qui regroupe "les habitants et les étrangers intéressés à préserver l'écologie, l'archéologie, l'histoire et la culture de Douiret" ². Cette association a entreprit de faire renaitre l'ancien village : reconstruction selon les techniques originales d'architecture et de construction, protection et valorisation du patrimoine socio-culturel, architectural et environnemental ... En d'autres termes le but est de sauvegarder le mode de vie, le savoir et les traditions de ce peuple, riche de plusieurs siècles d'histoire. L'originalité du projet tient à son mode de financement : outre les cotisations versées par les adhérents et les subventions accordées, c'est le village lui-même qui subvient (en partie pour l'instant) à ses besoins. Une quarantaine d'habitations ont été réhabilitées et aménagées en hôtel avec salle à manger, une partie des ghorfas servant de vitrines à l'artisanat et aux productions locales. Les revenus tirés de l'activité touristique servent à leur tour à financer la réhabilitation du reste du village. Grâce à leur travail nous pourrons pendant longtemps encore admirer le majestueux ksar veillant du haut de sa montagne sur la vie paisible du vieux village et de ses habitants. Pour en savoir plus : |
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